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« Les seniors recrutés se distinguent par leur volontarisme »

Le centre de formation de Bourgogne-Franche-Comté mise sur le talent des seniors, et c’est un succès. MURIEL KHALFAOUI, ADJOINTE À LA DIRECTION, partage avec nous les parcours inspirants de recrues dont la maturité, l’engagement et les potentiels ont fait la différence.

Publié le  16/10/2024

Quelles sont les spécificités de votre centre de formation ?

Muriel Khalfaoui : Le CFB est un centre de formation implanté à Besançon. Il fait partie du réseau des maisons familiales et rurales (MFR) et plus précisément de la fédération départementale centre sud. C’est aussi un centre de formation d’apprentis (CFA). Spécialisés dans le domaine sanitaire et social, nous proposons aussi bien des dispositifs d’accompagnement et des formations qualifiantes (BTS en économie sociale et familiale, CAP accompagnement éducatif à la petite enfance…) que des parcours Service à la personne. Nous accueillons des candidats âgés de 16 ans et plus.

Un point important à souligner concerne le dispositif DAQ 2.0 (dispositif en amont de la qualification), que nous mettons en œuvre au sein d’un groupement de sept organismes de formations locaux. Financé par le Conseil régional, il a pour objectif de favoriser l’accès ou le retour à l’emploi via l’engagement dans une démarche d’insertion. À ce sujet, je rappelle que France Travail fait partie du comité de pilotage et de suivi. Et que 58% des bénéficiaires du DAQ nous sont envoyés par ses conseillers.

La maturité d’Enzo et Pierre leur confère un côté rassurant dont leur public, assez fragile, a besoin.


Au sein du CFB, vous avez récemment intégré deux formateurs retraités. Pouvez-vous nous en expliquer les raisons et les effets ?

M.K. : Lorsque Franck Sudeix, le directeur du CFB, décide de réaliser un recrutement, nous recueillons différents profils. Nous nous focalisons plutôt sur les compétences ou une volonté de se former. De manière tout à fait naturelle, nous avons intégré deux retraités ayant démontré leur volonté de s’engager. Enzo et Pierre ont, en effet, exprimé leur souhait de conserver une dynamique de travail. Ils sont devenus formateurs. Le premier, sur des sujets de sciences et d’informatique ainsi que sur l’utilisation d’un simulateur de conduite et l’apprentissage du code de la route. Le second, sur l’acquisition des prérequis généraux en français, maths et informatique.

Ce sont des professionnels aguerris, qui arrivent à transmettre leur expérience de manière ludique, ce qui est très apprécié par les stagiaires. Ceux-ci ont souvent besoin de reprendre confiance. Ils sont particulièrement sensibles aux liens qui se créent avec ces deux formateurs bienveillants et à l’écoute. Leur maturité leur confère un côté rassurant dont leur public, assez fragile, a besoin.

Vous avez également salarié d’autres seniors, quel est leur parcours ?

M.K. : Pour notre nouvelle recrue, Fatima, nous avions au début fait appel à une structure d’insertion par l’activité économique (IAE). Nous l’avons par la suite intégrée à temps partiel sur un CDD d’agent d’entretien de nos locaux. Le principe, c’était aussi de la faire évoluer avec un contrat Parcours emploi compétences (PEC), avec une ambition de pérennisation. Nous allons prochainement lui proposer un CDD en milieu ordinaire avec une possible transition vers un CDI.

L’arrivée de Fabienne relève, quant à elle, d’une histoire différente. Une ancienne collègue (j’étais auparavant salariée chez France Travail) d’une agence France Travail de Besançon a évoqué le cas d’une cadre de 59 ans. À la suite d’un accident de la vie, elle a perdu son emploi dans le secteur de l’intérim. Depuis, confrontée à des réponses négatives à chaque candidature, et malgré sa volonté de retrouver un emploi, elle avait perdu toute confiance en elle. En lien avec son référent France Travail, nous avons proposé à Fabienne de commencer chez nous par un poste à temps partiel dans les relations administratives, avec un contrat PEC. Dans le cadre de notre développement interne, nous avons fait évoluer ses missions. Elle est à présent salariée dans les relations entreprises, ce qui la réjouit car elle retrouve son domaine d’expertise.

La cinquième recrue, Dominique, était bénéficiaire du DAQ. Rentrée en France après une vingtaine d’années au Sénégal, elle ne maîtrisait plus les codes du marché du travail. Une fois sa formation achevée, elle est devenue formatrice salariée chez nous et elle intervient sur le dispositif DAQ pour enseigner le français, l’histoire et des matières générales. Elle est bien placée pour comprendre les stagiaires et créer avec eux un relationnel de confiance.

Les seniors se sentent parfois fragilisés, alors qu’ils ont toute leur place et font preuve d’une réelle envie de partager leur expertise.


Qu’est-ce qui relie ces personnes que vous avez recrutées ?

M.K. : Elles expriment toutes une forte envie de retravailler. Ces seniors sont dotés de solides connaissances et ils se distinguent par la transversalité de leurs compétences, leur volontarisme, leur expérience mise au service des stagiaires ou de leurs collègues. Leur dynamisme est communicatif, de même que leur souhait de rester actifs.

J’aimerais insister sur le fait qu’il faut vraiment être à l’écoute des personnes, peu importe leur âge. Les seniors se sentent parfois fragilisés, alors qu’ils ont toute leur place et font preuve d’une réelle envie de partager leur expertise. Il me semble important de les valoriser en leur proposant des missions et en leur redonnant confiance. Même s’ils ne disposent pas forcément de la compétence recherchée, il faut leur offrir une chance et l’opportunité de l’acquérir. Au CFB, nous misons sur des rencontres et des potentiels. Et jusqu’à présent, nous ne pouvons que nous féliciter des résultats.