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Reconversion : nouvelles matières à réflexion !
Salariés, demandeurs d’emplois, jeunes, quinquas…, les souhaits de reconversion professionnelle affolent les compteurs des sondages. Si les facteurs sont multiples, l’évolution du marché du travail conjuguée à la quête de sens et aux nombreux dispositifs d’accompagnement dopent les résolutions… Tour d’horizon.
Publié le 17/03/2021
« De traductrice à développeuse Web », « du conseil à la boucherie », « du juridique à la layette »… Sur le portail du média nouvelleviepro.fr, les success stories de reconversion se suivent et ne se ressemblent pas. Un dénominateur commun toutefois : celui d’avoir fait le grand saut, d’avoir pris la tangente, d’avoir osé « se réaliser », là où il y a encore quelques années, les bifurcations, voire les changements professionnels radicaux, pouvaient être synonymes d’instabilité.
De là à « ringardiser » le parcours à métier unique, il n’y a qu’un pas : terreau de réinvention et d’accomplissement de soi, la quête d’expériences ou du métier « passion » ne semble plus nourrir que les fantasmes, désormais véhiculée comme un Graal à portée de main. « Autrefois, quand vous sortiez de l’école, vous embarquiez pour un métier toute votre vie. La question ne se posait pas », confie Bertrand-Marie, devenu menuisier et artisan d’art à l’âge de 55 ans, après une carrière de consultant RH pour de grandes sociétés américaines.
Après le 11 septembre, la clientèle de ce haut diplômé en sciences politiques et en psycho chute en même temps que ses idéaux, sous l’injonction des plans de licenciement, et la gestion de ressources « inhumaines », à l’opposé de ses valeurs. « Je suis donc passé par Pôle emploi pour entreprendre une formation de charpentier, ce qui m’a permis d’acquérir les bases de la restauration de meubles. » Un changement de cap que Bertrand-Marie, malgré les difficultés rencontrées dans ce secteur, ne regrette pas : misant sur ses multiples compétences, ce « curieux de nature » se dit aujourd’hui prêt à embrasser une nouvelle activité.
Une tentation multigénérationnelle
À l’image de Bertrand-Marie, les candidats à la reconversion semblent de plus en plus enclins à sauter le pas. Selon une enquête BVA, le phénomène s’est même accru depuis la fin du premier confinement, un temps propice à la remise en question : si un actif français sur deux déclare avoir déjà envisagé une reconversion professionnelle à cette période, 17 % l’auraient mené à terme.
En ce début d’année, un sondage Centre Inffo/CSA réalisé auprès de 1 600 actifs français confirme la tendance : un actif sur cinq serait engagé dans un processus, ainsi qu’un tiers des personnes sans emploi. Le taux de reconversion parmi les salariés avait également bondi de 10 points entre 2017 et 2019, pour atteindre 38 %, indique de son côté nouvelleviepro.fr, soulignant un intérêt majeur des moins de 30 ans, mais aussi des quinquas.
Derrière les intentions et les belles histoires relayées un peu partout dans les médias et les sites spécialisés, il est intéressant, analyse sur son blog Sylvaine Pascual, fondatrice d’Ithaque Coaching, d’en comprendre les ressorts plus profonds : « Sur un marché du travail à l’aube d’une transformation sans précédent, la fragmentation des carrières, les métiers en voie de disparition ou d’apparition et les bouleversements seront vecteurs de reconversion. Pour ceux qui exercent un métier voué à disparaître comme pour ceux qui songent à en changer, c’est l’occasion de jeter un coup d’œil à un marché en mutation. » Si, au-delà de l’évolution du marché du travail, les raisons poussant à changer de métier sont multiples, le sentiment d’arriver à la fin d’un cycle, le désir d’indépendance, la perte de sens dans le travail ou encore un faible niveau de salaire en demeurent les principaux catalyseurs, souligne-t-on chez BVA.
Des secteurs d’inspiration
Tendance de fond ou phénomène conjoncturel ? De la « ruée » vers le Larzac dans les années 1970 à l’explosion des maisons d’hôtes à l’aube du 2e millénaire, la quête de sens ne date pourtant pas d’hier. Décomplexée, démystifiée, la reconversion « nouvelle génération » se démarque en ce sens qu’elle murmure aux oreilles du plus grand nombre, quel que soit l’âge, le sexe, le niveau d’études. Avec l’essor des dispositifs d’accompagnement et de la formation professionnelle, la reconversion a même décollé de 40 % en 2020, corrobore une étude de maformation.fr.
Selon une enquête Robert Half, le contexte conjoncturel et sociétal entraîne davantage d’appétence pour les métiers liés aux nouvelles technologies, vecteurs d’opportunités, les services à la personne/de proximité, mais également les métiers manuels et de l’artisanat, symboles d’un retour à l’essentiel. Chez Switch Collective, qui aborde la reconversion sous le prisme du développement personnel, collectif, et du futur du travail, les jobs « à impact » attirent également de plus en plus d’aspirants au « switch » : « Préservation de l’environnement, transition écologique et digitale, économie sociale et solidaire…, ces domaines sont le reflet de valeurs, d’aspirations et de sensibilités croissantes », observe Jennifer Moukouma, directrice marketing de la start-up.
Une démarche engageante
C’est aussi le retour à ces valeurs qui a encouragé Céline, 45 ans, à repartir de zéro. Passé le choc de son licenciement, cette ancienne cadre opérationnelle n’a qu’une idée en tête : racheter une entreprise dans le bâtiment, être sa propre patronne. « L’entreprenariat, j’avais ça dans un coin de la tête. J’aimais déjà le bâtiment, le travail manuel. Du coup je me suis dit, c’est le moment. » Fraîchement débarquée dans un « monde d’hommes », Céline y voit un challenge supplémentaire aux multiples étapes qui l’attendent sur le chemin de la transition : « Quand on est cadre et qu’on veut devenir plombière, personne ne comprend. Mais c’est justement parce qu’on ne m’attendait pas dans cet univers que j’y suis allée. »
CAP de plomberie en poche, benchmark, entreprise en ligne de mire…, la « lauréate » profite des conseils du réseau Entreprendre après validation de son projet, un accompagnement qu’elle juge absolument nécessaire dans le cadre d’une création ou d’une reprise d’entreprise : « Le fait de défendre son projet, rencontrer des chargés d’études, des lauréats et d’avoir une écoute bienveillante, donne la confiance indispensable pour se lancer. Car cela n’a rien d’un parcours de santé ; il faut être conscient des sacrifices que cela demande à titre personnel et financier ».
À l’instar de Céline, la dynamique de reconversion dévoile mille et un visages. Président du réseau Entreprendre, Olivier de la Chevasnerie observe une remarque qui a elle seule, résume l’idée qu’un nouveau projet de vie s’inscrit bien loin du conte de fée que d’aucuns pourraient imaginer : « Sa réussite tient autant dans l’envie de s’engager qu’aux moyens qu’on lui soumet. Il faut être prêt à sortir de sa zone de confort ».
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*Baromètre de la formation et de l’emploi de Centre Inffo/Institut CSA, janvier 2021.
Cure de jouvence pour le bilan de compétences
La reconversion est un terrain que se partagent aujourd’hui nombre d’associations, coachs, cabinets RH, outils en ligne, mais également un nouveau cru de start-up, dont certaines ont eu cette idée folle… de réinventer le bilan de compétences. Ne se reconnaissant pas dans les outils traditionnels, les fondatrices de Switch Collective ont mis sur pied une nouvelle pédagogie de co-développement baptisée « Fais le bilan », qui embarque les participants dans du coaching individuel et collectif. Introspection, exploration, aspiration… : trois temps forts et trois mois de réflexion pour un bilan nouvelle génération, étroitement lié au travail de demain. Certifiée depuis 2020, cette méthode qui dépoussière les codes est notamment accessible via le CPF et l’OPCA. Un bilan qualifiant, voilà ce que propose également Primaveras, dont les programmes sont également éligibles au CPF. « Retour du plaisir et au sens dans le travail », programme de six mois pour révéler ses aptitudes et piloter son « virage de carrière »…, le réseau développe également un dispositif à destination des demandeurs d’emploi franciliens inscrits à Pôle emploi pour les accompagner dans leur projet de changement de métier/reconversion professionnelle. Et quoi de mieux qu’une immersion pour faire le point et trouver son chemin : des start-up comme Test Un Métier ou Vie Mon Job entraînent les candidats à la reconversion sur le terrain, pour les aider à changer de cap, ou non !
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