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« Sur 4 jours, les équipes travaillent moins mais mieux ! »
Camille Darde, DRH d’Elmy, fournisseur d’énergie renouvelable, nous dit tout sur la semaine de 4 jours qu’elle a mise en place il y a six mois dans son entreprise.
Publié le 20/02/2023
Pouvez-vous nous présenter elmy ?
Camille Darde : Nous sommes une société d’énergie 100 % renouvelable et française basée à Lyon, présente sur toute la chaîne de valeur de l’électricité : production et fourniture aux particuliers et professionnels. Nous comptons une centaine de collaborateurs d’une moyenne d’âge de 31 ans.
Pourquoi avez-vous décidé de mettre en place la semaine de 4 jours ?
C. D. : Nous sommes passés à la semaine de 4 jours le 1er septembre 2022.C’est un sujet qui pose la question de la place du travail dans notre vie : doit-on passer autant de temps au travail pour être heureux ? Gagner du temps pour soi ne permet-il pas d’être mieux au travail et meilleur dans son travail ? Par ailleurs, des discussions avec des neuropsychiatres m’ont appris que le travail sur 5 jours n’était pas le meilleur rythme pour le cerveau humain. Cette tradition relève davantage d’une culture du présentéisme que de la certitude qu’il s’agisse d’un gage de productivité et d’efficacité pour l’entreprise.
Qu’est-ce qui a déclenché la décision de passer à la semaine de 4 jours ?
C. D. : En mars dernier, nous avons profité d’un contexte de changement (cession d’une marque interne) et d’un besoin en recrutement pour nous lancer. La semaine de 4 jours nous a semblé être un signal fort à la fois sur notre engagement pour la qualité de vie au travail et un excellent point d’attractivité pour recruter.
De fait, nous avons recruté 60 personnes entre mai et décembre. Mais attention, il n’était pas question de lancer la semaine de 4 jours pour se faire valoir et en faire seulement un argument d’attractivité. Nous savions que la culture de notre entreprise était propice à ce changement et que nous étions mûrs pour entraîner nos salariés : nous sommes une entreprise holacratique (entreprise libérée), avec une majorité de cadres autonomes qui s’organisent dans une forme de responsabilité et de confiance. Les indicateurs étaient au vert !
« La semaine de 4 jours nous a semblé être un signal fort à la fois sur notre engagement pour la qualité de vie au travail et un excellent point d’attractivité pour recruter ».
Quelle méthodologie avez-vous appliquée pour conduire le changement ?
C. D. : L’intelligence collective a constitué le socle de notre démarche : pendant six mois, nous avons travaillé en interne via des consultations, des discussions, des sondages… Parallèlement, nous nous sommes appuyés sur l’apport d’expérience des équipes de LDLC, référence en la matière. Ces derniers ont par exemple répondu aux questions de nos équipes internes par secteur : commercial, technique, administratif…
Il était important d’évoquer les modalités concrètes, les points de vigilance, les réalités des métiers à travers ces échanges. Résultats : une grande majorité de nos collaborateurs se sont déclarés partants, car rassurés !
Comment se passent les 4 jours concrètement ?
C. D. : Aujourd’hui, nous sommes passés de 39 heures à 35 heures de travail pour les cadres, et de 35 heures à 32 heures pour les non-cadres, avec le maintien des salaires à 100 %. Les jours off sont choisis entre le mercredi et le vendredi. Ces jours sont intégrés aux plannings des équipes pendant un an pour consolider les organisations. Par ailleurs, avec le télétravail, nos collaborateurs n’ont qu’un seul jour imposé en présentiel. Un collaborateur peut donc travailler 3 jours chez lui et 1 jour dans l’entreprise, le 5e étant off.
« Tous nos indicateurs sont au même niveau qu’avant : volume de clients, lignes de produits, taux d’activité, satisfaction… »
Comment assurez-vous la continuité du service ?
C. D. : Chaque équipe s’est organisée selon ses contraintes : une équipe projet qui travaille sur un parc photovoltaïque sur plusieurs années n’a pas les mêmes impératifs qu’une équipe technique (maintenance de site web), indispensable au quotidien… De même, le service commercial est obligé d’assurer des roulements pour garantir la continuité des services 5 jours sur 5. Chaque équipe établit ses plannings pour répartir les mercredis et les vendredis. Si nous constatons que l’organisation des 4 jours déséquilibre la charge de travail, nous recruterons pour répondre aux besoins.
Quels constats faites-vous aujourd’hui ?
C. D. : En 4 mois, le retour d’expérience est très positif : sur 4 jours, les équipes travaillent moins mais mieux ! Tous nos indicateurs sont au même niveau qu’avant : volume de clients, lignes de produits, taux d’activité, satisfaction… La productivité ne baisse pas car les collaborateurs optimisent leur temps de travail pour profiter au maximum de leur jour libre.
Ils gagnent en efficacité en rationnalisant le travail, en réduisant les temps de réunions, en déléguant plus et mieux. Et bien sûr, nous avons gagné en qualité de vie au travail : moins de fatigue et de stress, et baisse de l’hyperconnexion.
Cette réduction du temps de travail est cohérente avec nos valeurs et participe à notre image positive auprès de nos clients, partenaires et fournisseurs. Je suis convaincue que le jour off est tellement bénéfique pour les collaborateurs qu’il ne peut être que bénéfique pour l’entreprise aussi !
Chiffres
64 % des salariés français souhaiteraient bénéficier d’une plus grande flexibilité dans l’organisation de leurs horaires de travail, avec la possibilité de les condenser sur une semaine de 4 jours.
Seules 19 % des entreprises ont mis en place un accord de travail flexible, et 5 % d’entre-elles ont adopté la semaine de 4 jours.
Source : étude ADP, mai 2022.
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