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Travailler au Luxembourg : eldorado ou terrain miné pour les frontaliers ?

Leur nombre ne cesse d’augmenter, mais le doute est là : lassés des difficultés de transport, de plus en plus de frontaliers français embauchés au Luxembourg souhaitent retrouver un emploi dans l’Hexagone. Quitte à renoncer à d’avantageux salaires ? Tour du Grand-Duché, entre source de désillusion et réel pôle d’attraction.

Publié le  31/10/2024

En 2023, le Statec (Institut national de la statistique et des études économiques du Grand-Duché de Luxembourg) a recensé 122 889 frontaliers français, tandis qu’en 2024, l’Agence pour le développement de l’emploi (Adem) estime qu’environ 75% de la main d’œuvre du pays est composée de travailleurs immigrés ou frontaliers, pour moitié des Français. L’Agence d’urbanisme et de développement durable Lorraine Nord (Agape) a même estimé que ce nombre pourrait atteindre 160 000 en 2040.

Une progression qui semble pourtant remise en question : épuisés par des trajets interminables, en recherche d’un meilleur équilibre vie professionnelle-vie privée, de nombreux travailleurs frontaliers lorrains se disent prêts à renoncer à un salaire plus élevé au Luxembourg au profit d’un emploi dans leur région.

Un salaire annuel moyen de 75 919 euros brut

Considéré comme l’un des pays les plus riches du monde en termes de produit intérieur brut (PIB) par habitant, le Grand-Duché affiche de nombreux atouts. Ainsi, selon le Statec, il propose le salaire annuel brut moyen le plus élevé de l’Union européenne : soit 75 919 euros contre 41 706 euros en France (chiffres de 2022). Quant au salaire minimum en 2024, il atteint 2 570,93 euros brut pour un salarié non qualifié et 3 085,11 euros pour un salarié qualifié. Il faut cependant moduler ces chiffres, sachant que la durée légale du travail au Luxembourg est de 40 heures par semaine. En outre, la différence entre les salaires au Grand-Duché et ceux des pays voisins s’estompe dans des secteurs tels que l’hôtellerie-restauration.

Autre atout du Luxembourg : les prestations familiales. Les parents perçoivent une allocation familiale de 292,54 euros par mois et par enfant et des bourses d’études généreuses pour les enfants suivant des études supérieures.

Les transports : un frein important

Alors pourquoi tant de frontaliers veulent-ils quitter ce qui s’apparente à un pays de cocagne ? Certes, la crise sanitaire a remis en question les priorités, la quête de sens au travail, notamment chez ceux qui souhaitent télétravailler. Mais ce qui fait vraiment pencher la balance, c’est la question des transports. Certains frontaliers passent en moyenne trois à cinq heures par jour entre leur domicile en France et leur travail au Luxembourg : les automobilistes qui empruntent l’A31 reliant la Meurthe-et-Moselle à la capitale du Grand-Duché font état d’une circulation constamment ralentie.

Quant aux travailleurs qui choisissent le train, ils se plaignent de la forte affluence et de retards quasi quotidiens, voire d’annulations intempestives. Conscient de la pénibilité des trajets, le Grand-Duché a lancé de nombreux projets destinés à améliorer la mobilité transfrontalière : augmentation du nombre de TER, création de parkings et lancement d’un RER transfrontalier entre la Lorraine et le Luxembourg à l’horizon 2035, avec un cadencement similaire à celui du RER francilien.

Taux de chômage et secteurs porteurs

Entouré par la France, la Belgique et l’Allemagne, le Grand-Duché de Luxembourg occupe une superficie de 2 586 km² (à titre de comparaison, elle est de 543 940 km² pour la France métropolitaine). Ce pays majoritairement rural est dirigé par une monarchie constitutionnelle. On y parle le luxembourgeois, le français et l’allemand. L’environnement de travail est international et multiculturel, propulsé par le dynamisme du secteur tertiaire.
En janvier 2024, 672 050 personnes habitent au Luxembourg, dont 47,3% d’étrangers. Les plus nombreux sont les Portugais (93 659), suivis par les Français (49 071). Le taux de chômage est de 5,7% en juillet 2024, contre 7,3% en France.

Selon l’Adem, en juin 2024, dix secteurs d’activité recrutent activement :

  • Comptabilité et gestion ;
  • Systèmes d’information et de télécommunication ;
  • Secrétariat et assistance ;
  • Action sociale, socio-éducative et socio-culturelle ;
  • Production culinaire ;
  • Second œuvre ;
  • Organisation et études ;
  • Service ;
  • Banque ;
  • Finance.

Quant aux métiers en pénurie, ils se concentrent dans les secteurs de la banque et de la finance, des technologies de l’information, de l’ingénierie, de la santé et des soins à la personne, de l’action sociale et des services support à l’entreprise (RH, comptabilité, audit et conseil juridique).

Chômage et retraite : quels droits ?

Le droit européen favorise la flexibilité des carrières entre plusieurs pays en protégeant les travailleurs. Ainsi, ceux qui quittent leur emploi au Luxembourg ont le droit à l’allocation chômage en France. De plus, ils peuvent effectuer plusieurs missions dans l’un ou l’autre pays et cumuler leurs droits à la retraite de la même façon que s’ils effectuaient toute leur carrière en France.