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Vincent Baud, de la Fondation Projet 41-21 : « Il faut faire de l’écoute le premier principe de prévention des atteintes à la santé mentale »

VINCENT BAUD, spécialiste de la santé et qualité de vie au travail (SQVT), est professeur à l’université d’Aix-Marseille, dirigeant du CABINET MASTER et auteur de La QVT – En finir avec les conneries*. Il travaille sur la santé mentale au sein de la Fondation Projet 41-21 et d’un programme de recherche centré sur l’écoute des travailleurs. Tribune.

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J’ai commencé ma carrière en tant qu’ouvrier dans une usine. J’ai ensuite évolué vers le métier de chef d’équipe, puis vers celui de directeur. En occupant ces fonctions managériales, j’ai compris une chose : l’écoute favorise un management plus performant et participatif, influençant de fait le bien-être des salariés.

Par la suite, mon expérience à la direction des risques professionnels d’une caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) a mis en exergue le décalage entre les prescriptions faites par les organisations pour préserver la santé physique et mentale des collaborateurs et la réalité du terrain. En d’autres termes, nous disions quoi faire aux travailleurs pour être en bonne santé… sans écouter leurs besoins

Cette observation a eu l’effet d’un déclic. Il n’y a pas de santé physique et mentale sans l’écoute des travailleurs. L’écoute des problématiques qu’ils rencontrent pour bien faire et bien vivre leur travail, mais également des solutions qu’ils apportent. Pourquoi ? Parce que la santé au travail ne se résume pas aux accidents du travail : il doit y avoir une égalité de traitement entre santé physique et santé mentale. 

Et si la plupart du temps la santé physique se voit, s’observe, la santé mentale, elle, s’écoute. Je dirais d’ailleurs que l’écoute est consubstantielle au principe de SQVT. Pourtant, elle reste encore trop souvent perçue par les entreprises comme un supplément d’âme. Alors même qu’en France, moins de la moitié des travailleurs se dit être informée ou consultée par les organisations lors de prises de décisions significatives, et que notre état de santé au travail se dégrade. En parallèle, l’attractivité des employeurs est en perte de vitesse

Cette écoute des travailleurs, qu’ils soient managers, collaborateurs, intérimaires, vacataires ou sous-traitants, peut inverser la tendance. Les retours terrain des entreprises la mettant en pratique prouvent en outre l’efficacité d’une telle approche. 
 

Ce projet de recherche s’adresse en premier lieu aux dirigeants, qui se doivent d’impulser le changement.


Il faut faire de l’écoute le premier principe de prévention des atteintes à la santé mentale. Et ce, jusque dans le code du travail et à grande échelle, car les initiatives isolées ne suffiront pas pour changer de paradigme managérial

Seule une démarche d’ampleur, structurée et partagée par tout un écosystème pourra fonctionner et nous permettre collectivement d’élaborer des politiques de SQVT efficaces. C’est pourquoi, en partenariat avec de nombreux acteurs de la prévention, nous avons lancé la Fondation Projet 41-21, dont l’objectif vise à développer une nouvelle norme de management de la performance par l’écoute, au travers d’un projet de recherche rassemblant 1 000 entreprises volontaires, de toutes tailles et de tous horizons. 

Ce projet de recherche s’adresse en premier lieu aux dirigeants, qui se doivent d’impulser le changement. Il repose sur un référentiel de dix blocs de compétences rassemblées sous le triptyque « écouter – évaluer – agir ». 

Concrètement, cela veut dire que les parties prenantes au projet s’engagent à écouter ce que leurs salariés ont à dire pour mieux faire et mieux vivre leur travail, à réaliser une évaluation des risques en conséquence et à imaginer des solutions permettant de créer des espaces de discussion et de transformation du travail. De plus, les résultats des études et actions réalisées seront rendus publics, afin de contribuer pleinement à l’état de l’art en matière de management et de santé au travail. 

Ainsi, par cette initiative, nous souhaitons engager un mouvement d’ensemble au service de la santé physique et mentale. Nous souhaitons passer de cas exceptionnels à des pratiques et cas d’usage de masse, bénéfiques à tous. 


*Éditions Master, 2022
 

La Fondation Projet 41-21

 

La Fondation Projet 41-21 est une fondation par fonds de dotation composée d’un conseil d’administration, d’un comité de pilotage et d’un comité d’évaluation. 

Parmi ses membres figurent Sophie Thiéry, cogarante des Assises du Travail, Jean-François Naton, membre du Conseil économique social et environnemental (CESE) et ancien président de l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), Michel Ledoux, avocat en santé au travail, Malakoff Humanis, Fidal, Cyril Cosme, directeur du Bureau international du travail (BIT) pour la France, quatre services de prévention et santé au travail, des chercheurs universitaires, ou encore Hervé Lanouzière, directeur de l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (INTEFP).

À ce jour, 50 organisations se sont portées volontaires pour rejoindre l’initiative en tant qu’entreprises ou référents Projet 41-21. 
 

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