​​​​​Rencontre avec Julien Sastre, entraîneur du triplé olympique de BMX Racing

En août 2024, son équipe a obtenu un podium historique : bronze, argent et or, en BMX Racing. Derrière cette victoire, un entraîneur : Julien Sastre. Le sélectionneur livre des enseignements sur la gestion des talents, la confiance et la capacité à transformer les échecs en opportunités de progression. Dans le sport de haut niveau comme dans le monde du travail, l’équilibre entre réussite personnelle et dynamique d’équipe est une équation complexe. Faut-il sacrifier son ambition individuelle pour atteindre un objectif commun ? Comment instaurer une culture de la coopération sans brider l’excellence ? Le coach partage sa vision.  

Apprendre à perdre pour mieux gagner

Une carrière d’athlète de haut niveau est jalonnée d’échecs. Dans une organisation, les revers sont tout aussi inévitables : une stratégie qui échoue, un projet qui n’aboutit pas, une restructuration qui bouscule les équipes… Aux Jeux de Tokyo, l’équipe de France de BMX est repartie sans médaille. Mais Julien Sastre a tout fait pour transformer cet échec en nouveau départ. 

« Une contre-performance est douloureuse, mais elle doit être analysée avec lucidité. Dans un collectif, le rôle du leader est d’accompagner cette transition : laisser le temps à l’émotion, puis redonner du sens et identifier les leviers de progression. » 

Prendre le temps d’accepter un échec, en tirer des enseignements et accompagner chaque individu selon son propre rythme ont permis à son équipe de rebondir. « Certains ont eu besoin d’un an pour se remobiliser, d’autres ont même failli lâcher le vélo. » Mais en redonnant progressivement une direction et une raison de croire en un nouvel objectif, Julien Sastre a transformé un revers en moteur de succès. 

Viser haut : l’audace comme moteur de performance

Après Tokyo, Julien Sastre se donne de nouveaux buts. Plutôt que de viser une médaille, il fixe un objectif audacieux et inédit pour Paris : un triplé olympique. « Beaucoup restent au niveau du rêve. Mais faire le premier pas vers son rêve, c’est autre chose. Assumer un objectif, c’est transgresser la norme. » 

Cette ambition, d’abord perçue comme une utopie, devient progressivement une évidence au sein de l’équipe. Par l’influence, la persuasion et une stratégie d’adhésion progressive, il parvient à transformer cette vision en réalité. « J’ai commencé avec le staff, ensuite avec les entraîneurs individuels, puis les familles des athlètes, et enfin les médias. Six mois avant les Jeux, tout le monde parlait du triplé. » 

Dans une entreprise, un dirigeant qui impulse une vision forte, en impliquant ses équipes et en instaurant un climat de confiance, maximise les chances de succès. L’audace, si elle est portée par un collectif, devient un moteur puissant. 

Construire une coopération efficace

Le BMX est un sport individuel, et pourtant, c’est bien la force du collectif qui a permis aux Français de dominer la discipline à Paris. Un constat qui s’applique aussi aux organisations : la performance individuelle ne suffit pas, c’est l’environnement qui détermine le niveau d’excellence.  

Dans une entreprise, c’est la même dynamique : une équipe qui partage ses connaissances, confronte ses idées et s’entraîne dans des conditions exigeantes progresse plus vite que des individus isolés. Encourager l’intelligence collective, c’est offrir à chacun un environnement où il peut aller plus loin que s’il était seul. 

« Ils ont pu générer des performances bien supérieures à ce qu’ils auraient atteint seuls. » 

L’enjeu était de transformer une concurrence interne forte en un levier de progression. « Nos adversaires s’entraînent seuls ou à deux. Nous, nous avons la chance d’avoir une densité de niveau unique. L’entraînement devait devenir plus dur que la compétition. » 

Plutôt que d’imposer une stratégie collective, Julien Sastre mise sur une coopération naturelle fondée sur le partage de l’excellence. « En mettant en commun leurs forces à l’entraînement, ils ont pu générer des performances bien supérieures à ce qu’ils auraient atteint seuls. » 

Un parallèle évident avec le monde de l’entreprise, où la collaboration et le partage des compétences sont essentiels pour élever le niveau général d’une équipe. 

Créer et entretenir une confiance durable

La confiance est le socle de toute équipe performante. Elle ne s’impose pas, elle se construit au fil du temps. 

« La confiance se gagne en gouttes et se perd en litres. Un acquis de confiance qui met des années à se construire peut être détruit en un instant. » 

Pour Julien Sastre, l’une des clés est d’associer les individus aux décisions et de créer un environnement où chacun peut s’exprimer. « La confiance passe par un projet partagé. Plus un collaborateur a un rôle actif dans l’évolution d’un projet, plus il est engagé et prêt à se dépasser. » 

Mais cet environnement participatif ne signifie pas l’absence d’un cadre fort. « Mon rôle, c’est aussi d’arbitrer, de prendre des décisions difficiles et de les assumer en toute transparence. »  

Dans une organisation, cette confiance passe par la clarté des objectifs, la reconnaissance des contributions et la transparence dans la prise de décision. Un cadre solide et bienveillant permet à chacun d’évoluer avec sérénité et efficacité.