Marché de l’emploi cadres : tendance pour les recrutements 2025

Le vent tourne pour le recrutement des cadres. Après une décennie de croissance, les recrutements ralentissent en 2024, mais les besoins en compétences restent élevés, surtout dans des secteurs stratégiques comme l’informatique et la R&D.

Publié le  14/04/2025

À l’instar de l’ensemble des prévisions d’embauche pour 2025 évaluées dans le cadre de notre enquête BMO, les tendances du marché de l’emploi chez les cadres s’annoncent plutôt moroses.  

L’Association pour l’emploi des cadres (Apec), qui a publié le 3 avril son analyse annuelle réalisée à partir d’un sondage auprès de 8 000 entreprises, évoque un « retournement de tendance » en matière de recrutement. L’organisme partenaire de France Travail relève même une « sévère correction » essuyée par le marché. Celui-ci accuse en effet un recul de 8 % des recrutements en 2024 par rapport à l’année précédente, avec 303 400 cadres embauchés.

Un recul inédit depuis plus d’une décennie

En cause : un climat économique peu favorable, et un manque de visibilité à moyen terme, qui freinent les investissements des entreprises, traditionnellement moteurs du recrutement. « Recruter des cadres, c'est réaliser un investissement important pour une entreprise. Le contexte d'incertitude économique et politique leur a fait réduire la voilure de leurs investissements en général, et en particulier de leurs recrutements de cadres », confirme Emmanuel Kahn, responsable du pôle Etudes de l'Apec.

La hausse des tarifs douaniers imposés outre-Atlantique risque également de peser sur les perspectives économiques. Des secteurs tels que la viticulture, l’aéronautique ou encore l’automobile se trouvent en première ligne.  

Selon le conjoncturiste, « cela fait plus de dix ans qu’une telle baisse n’avait pas été observée, hors période de crise sanitaire. » Les projections pour 2025 suggèrent même une nouvelle baisse consécutive, une première depuis l’éclatement de la bulle Internet dans les années 2000.  

La plus forte baisse en 10 ans.


L’informatique en pause, mais toujours moteur

L’Apec observe ainsi un repli des embauches dans toutes les régions et tous les secteurs d’activité, même si la Bretagne, l’Occitanie et la Nouvelle-Aquitaine montrent des signes de stabilisation. En revanche, les services à forte valeur ajoutée, en particulier l’informatique (-18 %), mais aussi l’industrie, le commerce ou encore la construction sont touchés de plein fouet.  

« On parle tout de même de plus de 300 000 recrutements en 2024, et des niveaux qui, à l’échelle de la décennie, restent historiquement élevés », nuance Emmanuel Kahn. Par ailleurs, le nombre total de cadres en poste continue de progresser, avec une croissance de 1,8 % des effectifs portée en partie par la promotion interne. Un signe que, malgré le retournement, les entreprises poursuivent leur structuration et que la dynamique de fond demeure.  

Les fonctions informatiques figurent encore en tête des intentions de recrutements cadres en 2025 : 55 600 postes seront à pourvoir dans ces secteurs. « Ce sont justement ces métiers, liés au numérique, à l’innovation ou à l’écologie, qui subiront les ajustements les plus marqués à court terme, mais qui porteront la dynamique de croissance à moyen et long terme », assure Emmanuel Kahn. 

Des fonctions comme la cybersécurité, la data ou l’intelligence artificielle restent très demandées. D’autres professions, dans les fonctions commerciales ou les métiers de l’ingénierie, en particulier les cadres en études et R&D, se montrent résilients : ces profils techniques, capables de porter la modernisation industrielle ou d’ouvrir de nouveaux marchés, restent très recherchés.

 Les jeunes diplômés sont souvent les premiers touchés lors d’un repli.


Recrutement des cadres : en quête d’expérience

Plus globalement, les recruteurs de cadres tendent à privilégier des candidats dotés d’une à dix années d’expérience professionnelle ; des profils privilégiés dans 60 % des intentions de recrutement en 2025. Leur force : incarner le compromis entre compétence, agilité et potentiel d’évolution.  

Les jeunes diplômés sont plus à la peine. En 2024, déjà, leurs recrutements ont chuté de 19 %, et un recul de 16 % se profile en 2025, avec seulement 41 000 embauches anticipées. « Les jeunes diplômés sont souvent les premiers touchés lors d’un repli, mais aussi les premiers à bénéficier d’une reprise », rassure Emmanuel Kahn.  

Fait notable : si les entreprises freinent leurs embauches, les cadres, eux, restent en demande de mobilité. Ce décalage entre l’offre et la demande pourrait, selon le conjoncturiste de l’Apec, « faire évoluer le rapport de force au détriment des cadres, avec des marges de négociation moins grandes et moins de flexibilité sur les critères de recrutement côté entreprises. » Conséquence : certains profils, tels que les demandeurs d’emploi, seniors ou publics issus des quartiers prioritaires, pourraient être davantage écartés des recrutements, dans un contexte de frilosité. D’où la nécessité, conclut-il, d’un accompagnement renforcé par l’Apec et France Travail, pour garantir un marché de l’emploi cadre plus inclusif.

BMO : Une tendance à confirmer

Si les perspectives pour l’emploi cadre en 2025 sont en baisse, les besoins en compétences, eux, ne faiblissent pas. La transformation des entreprises, les transitions numérique et écologique, et les mutations industrielles continueront d’appeler des profils qualifiés, même dans un contexte plus tendu. 
Autant d’éléments qu’explore en détail la dernière édition de notre Enquête Besoins en Main d’Œuvre (BMO), publiée le 11 avril. Cette étude de référence, qui couvre l’ensemble des secteurs et des territoires, met en lumière les grandes dynamiques de recrutement en France. De quoi affiner les stratégies des acteurs de l’emploi, et mieux anticiper les besoins à venir.

 

Apec et France Travail : sur le front de l’emploi  

Le contexte actuel et les perspectives de recrutement des cadres et des jeunes diplômés rend plus que jamais nécessaire l’action commune de l’Apec et de France Travail, unies par un accord-cadre pour 2024-2027. L’objectif : mieux accompagner les publics concernés et aider les entreprises à pourvoir leurs besoins en compétences qualifiées. Une coopération engagée depuis plusieurs années pour renforcer l’accompagnement des demandeurs d’emploi mais aussi soutenir les TPE-PME confrontées à des difficultés de recrutement de profils expérimentés.  

En parallèle, né de la réforme du plein emploi, le réseau pour l’emploi (RPE) vise à renforcer la coopération et coordination entre les acteurs du champ de l’emploi et de l’insertion : piloté par France Travail, l’APEC, les missions locales, Cap emploi ou encore les collectivités, s’attachent à répondre aux besoins du marché et éviter les ruptures de parcours. Un maillage territorial qui, face aux incertitudes économiques, représente un levier majeur.